
Valérie Rousseau
Responsable prospective et stratégie expertise sociale
v.rousseau@bakertilly.fr
La protection sociale complémentaire (PSC) permet de garantir une couverture supplémentaire en matière de prévoyance, frais de santé et retraite, au-delà des régimes obligatoires. Pour bénéficier des avantages fiscaux et sociaux liés à ces régimes, les entreprises doivent respecter des critères stricts définissant les catégories objectives de salariés bénéficiaires. Une prolongation de la période transitoire a été dernièrement annoncée, offrant un délai supplémentaire aux entreprises pour se mettre en conformité avec les nouvelles réglementations.
Le financement patronal des régimes de protection sociale complémentaire (régimes de prévoyance, frais de santé et de retraite supplémentaire) est exclu de l'assiette des cotisations et contributions sociales, sous réserve que ces régimes présentent un caractère collectif et obligatoire.
Pour être collectives, les garanties doivent bénéficier à l’ensemble des salariés ou à une partie d’entre eux, sous réserve qu’ils appartiennent à une ou plusieurs catégories objectives de salariés définies par la réglementation.
Ces critères impartiaux et mesurables, qui permettent de les distinguer des autres salariés au sein de l’entreprise, sont fixés à l'article R. 242-1-1 du code de la Sécurité sociale :
L’importance des catégories objectives a été renforcée par plusieurs réformes législatives et réglementaires ; la plus récente étant celle introduite par le décret 2021-1002 du 30 juillet 2021.
Avant cette réforme, les critères de définition des catégories objectifs reposaient sur des références à la Convention collective nationale (CCN) des cadres de l’AGIRC du 14 mars 1947. Cette convention était historiquement utilisée pour distinguer les cadres des non-cadres, notamment en matière de régimes de retraite complémentaire.
Cependant, à la suite de la fusion des régimes AGIRC et ARRCO au 1er janvier 2019, la CCN de 1947 a été abrogée, rendant les anciennes définitions obsolètes.
Pour remédier à cela, le décret du 30 juillet 2021 a actualisé les critères en se basant désormais sur l’Accord national interprofessionnel (ANI) du 17 novembre 2017. Ce décret donne également compétence aux partenaires sociaux en soumettant les conventions et accords de branches à l’agrément de la commission paritaire de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC).
Ancienne version | Nouvelle version | |
Critère 1 - Appartenance aux cadres/non-cadres | Article 4 de la CCN AGIRC du 14 mars 1947 | Article 2.1 de l'ANI du 17 novembre 2017 |
Article 4bis de la CCN AGIRC du 14 mars 1947 | Article 2.2 de l'ANI du 17 novembre 2017 | |
Article 36 de l'annexe I de la CCN AGIRC du 14 mars 1947 | Pas de transposition de cet article dans l'ANI du 17 novembre 2017. Seul un ccord interprofessionnel ou une convention de branche peut décider d'assimiler certains salariés à la catégorie cadre, sous réserve de l'agrément de la convention paritaire de l'APEC | |
Critère 2 - Rémunération | Utilisation des tranches de rémunérations AGIRC et ARRCO | Utilisation du plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS) ou à 2,3,4 ou 8 fois ce plafond (les salariés dont la rémunération excède 8 PASS ne peuvent constituer une catégorie objective). |
Critères 3 (appartenance aux catégories et classifications professionnelles des conventions collectives), 4 (appartenance aux sous-catégories des conventions collectives) et 5 (appartenance à une catégorie liée aux usages en vigueur dans la profession) | Pas de changement |
Ce décret, entré en vigueur le 1er janvier 2022 avait instauré un régime transitoire, jusqu’au 31 décembre 2024, pour laisser le temps aux entreprises de se mettre en conformité.
Durant cette période transitoire, elles pouvaient continuer à utiliser les anciennes références, tant qu’aucune modification dans la définition des catégories de personnel n’intervenait.
Toutefois, les entreprises qui ont mis en place un régime de PSC à compter du 1er janvier 2022 ont dû immédiatement se conformer au décret du 30 juillet 2021, sans pouvoir bénéficier de la période transitoire.
Dans un courrier daté du 6 février 2025, le ministère du Travail invite les Urssaf à faire preuve de tolérance vis-à-vis des entreprises relevant de branches ayant demandé l'extension de l'avenant modificatif de leur régime de PSC et déposé une demande d'agrément auprès de l'APEC avant le 31 décembre 2024.
Cette tolérance permet aux entreprises de conserver le régime social de faveur appliqué aux contributions patronales finançant les garanties de PSC après la date butoir du 31 décembre 2024 et donc ne pas se voir sanctionnées par l’Urssaf en cas de contrôle.
Deux situations doivent être distinguées selon que la branche obtient ou non l'agrément de l'APEC :
Dans les branches n'ayant pas encore conclu d'accord, ou demandé son extension et son agrément par la commission APEC, les URSSAF préviennent qu’aucune tolérance ne sera accordée aux entreprises qui n’auront pas agi avant le 1er janvier 2025 et pourront remettre en cause les exonérations patronales sur ces régimes de prévoyance.
Si les contrats de protection sociale s’appliquent à l’ensemble des salariés, aucune modification ne sera à effectuer. Si les contrats de protection sociale font une distinction selon les catégories objectives modifiées, l'employeur est tenu de mettre à jour ses contrats et l’acte de mise en place du régime lié : DUE (décision unilatérale de l'employeur), conventions ou accords collectifs, référendum.
L’absence de mise en conformité du contrat et de la DUE expose l'employeur à un redressement URSSAF.
À noter
La première étape consiste donc à vérifier le niveau de classification et des emplois de vos salariés afin d’identifier les bénéficiaires du régime de prévoyance selon les catégories objectives cadres/non-cadres.
Ensuite, il convient de contacter votre assureur pour la mise en conformité de vos contrats, de mettre à jour les actes juridiques de mise en place (décision unilatérale, accord d’entreprise…), puis de communiquer auprès de vos salariés (acte de mise en place, descriptif des garanties) et de conserver la preuve de leur diffusion.
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Les équipes de notre partenaire Ombello sont également à votre disposition pour la mise en conformité de vos contrats et actes juridiques.
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