La loi Sapin I, adoptée en 1993, a posé les bases de la prévention de la corruption et de la transparence de la vie économique et des procédures publiques. En 2016, la loi Sapin II a renforcé cette démarche. Divers dispositifs ont été, dans ce cadre, mis en place, dont certains sont spécifiquement destinés aux entreprises.
La loi Sapin II impose aux entreprises de plus de 500 salariés et réalisant un chiffre d'affaires consolidé supérieur à 100 M€ de jouer un rôle clé dans la lutte contre la corruption, le trafic d'influence et les détournements de fonds. Elle responsabilise également leurs dirigeants et collaborateurs dans cette mission.
Les entreprises sont, ainsi, incitées à mettre en place et à assurer le suivi de différentes actions :
a. Instauration d’un code de bonne conduite
La loi Sapin II exige des entreprises concernées l’instauration d’un code de bonne conduite, intégré au règlement intérieur, qui détaille les pratiques à éviter. Ce code est appuyé par des dispositifs de contrôle et des pistes d’audit permettant de détecter d’éventuels actes de corruption ou comportements contraires aux normes. Il inclut également des exemples concrets de comportements interdits associés à la corruption ou au trafic d’influence.
b. Mise en place d’un dispositif de signalement
La loi Sapin II impose, également, la mise en place d’un dispositif d’alerte interne destiné à permettre le recueil des signalements émanant de salariés de l’entreprise et relatifs à l'existence de conduites ou de situations contraires au code de conduite mis en place par la société.
Les lanceurs d’alerte bénéficient d’une protection spécifique. À ce titre, il est notamment prévu qu’aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation professionnelle, qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir signalé une alerte.
De la même manière, il est prévu que les personnes ayant signalé ou divulgué publiquement des informations ne sont pas civilement et pénalement responsables des dommages causés du fait de leur signalement ou de leur divulgation publique, dès lors qu'elles avaient des motifs raisonnables de croire, lorsqu'elles y ont procédé, que le signalement ou la divulgation publique de l'intégralité de ces informations était nécessaire à la sauvegarde des intérêts en cause.
c. Cartographie des risques
Les entreprises sont également tenues de cartographier les risques sous la forme d'une documentation régulièrement actualisée et destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques d'exposition de la société à des sollicitations externes aux fins de corruption, en fonction notamment des secteurs d'activités et des zones géographiques dans lesquels la société exerce son activité.
Des procédures d'évaluation de la situation des clients, des fournisseurs et des intermédiaires doivent également être mises en œuvre au regard de cette cartographie des risques. Des procédures de contrôles comptables, internes ou externes, destinées à s'assurer que les livres, registres et comptes ne sont pas utilisés pour masquer des faits de corruption ou de trafic d'influence sont, en outre, à instaurer.
d. Formation des collaborateurs
Par ailleurs, il est prévu que les entreprises mettent en place des actions de formation destinées aux salariés les plus exposés aux risques de corruption et de trafic d'influence.
En cas de manquement constaté et de non-conformité, et après avoir mis l’entreprise concernée en mesure de présenter ses observations, le magistrat qui dirige l'Agence française anticorruption* peut adresser un avertissement aux représentants de la société.
Il peut également saisir la commission des sanctions pour contraindre la société et ses représentants à adapter leurs procédures de conformité internes, afin de renforcer la prévention et la détection des faits de corruption ou de trafic d'influence.
Il peut, en outre, saisir cette même commission afin que soit infligée une sanction pécuniaire dont le montant doit être proportionné à la gravité des manquements constatés et à la situation financière de la personne physique ou morale sanctionnée (dans la limite de 200 000 € pour une personne physique et de 1 M€ pour une entreprise).
Enfin, la commission des sanctions peut ordonner la publication, la diffusion ou l'affichage de la décision d'injonction ou de sanction pécuniaire ou d'un extrait de celle-ci.
Si la loi Sapin II impose aux entreprises un cadre légal rigoureux, elle constitue une formidable opportunité pour celles qui souhaitent se démarquer par leur engagement éthique. Une conformité exemplaire devient, ainsi, un gage de sérieux et de fiabilité, des qualités essentielles pour gagner la confiance des investisseurs, attirer de nouveaux clients ou décrocher des partenariats à l’international ; des efforts qui peuvent également renforcer la motivation et l’implication des collaborateurs.
*L'Agence française anticorruption, dirigée par un magistrat, a pour mission d'aider les autorités compétentes et les personnes qui y sont confrontées à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d'influence, de concussion, de prise illégale d'intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme. Ses missions incluent la prévention et la lutte contre la corruption via la coordination et la diffusion d’informations auprès des entreprises et collectivités. Elles impliquent également le contrôle des procédures internes, le signalement au procureur des faits potentiellement délictueux, et la publication d’un rapport annuel d’activité.
Sources