Julie Baudet
Avocat associé
j.baudet@oratio-avocats.com
L'employeur est tenu à des obligations strictes en matière de santé et de sécurité au travail de ses collaborateurs. Cela inclut la prévention des accidents et des risques professionnels, y compris ceux liés à l'alcoolémie. Mais quelles sont les règles régissant le contrôle de l’alcoolémie dans l’entreprise ? Et quelles sanctions sont prévues si l’ébriété d’un salarié est confirmée ? Nos experts vous répondent.
L'état d'ébriété d'un salarié, qu'il ait consommé de l'alcool avant de se rendre au travail ou sur le lieu de travail, comporte divers risques pour l'intéressé, pour les autres membres du personnel, et pour l'entreprise elle-même (absences éventuelles au poste de travail, manque d'efficacité voire erreurs dans son travail, difficulté de concentration et de prise de décision, difficultés relationnelles voire altercations avec les autres membres de l'entreprise, risques d'accident…).
Pour ces diverses raisons, l'employeur peut souhaiter contrôler le taux l'alcoolémie d'un salarié à titre préventif ou lorsque le comportement de l'intéressé laisse à penser qu'il est en état d'ébriété. Cela se conçoit d'autant plus que l'employeur a une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise et qu'il doit en assurer l’effectivité. En outre, le Code du travail lui interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse (C. trav. art. R 4228-21).
Le recours à un test d’alcoolémie n’est possible que s’il a été prévu dans le règlement intérieur de l’entreprise et que les salariés ont été informés de son contenu. Une note de service, répondant aux mêmes formalités qu’un règlement intérieur, peut également prévoir la réalisation d’un tel test. Ces documents doivent être extrêmement précis quant à la marche à suivre pour l’effectuer.
Compte tenu des risques d'atteinte aux libertés individuelles pouvant en résulter, la jurisprudence limite les situations dans lesquelles un test d’alcoolémie peut être réalisé et impose le respect d'une procédure tendant à garantir les droits du salarié :
Si les conditions sont remplies, le test peut être réalisé par l’employeur (ou une personne désignée dans le règlement intérieur ou la note de service) via un alcootest jetable ou un éthylotest électronique homologué. Si la présence de la police n’est pas nécessaire, celle d’un tiers (un élu CSE ou un autre salarié) peut être la bienvenue.
Un salarié qui refuserait de pratiquer un alcootest, alors que cette disposition est prévue dans le règlement intérieur ou la note de service, commet une faute et peut être, à ce titre, sanctionné.
Si le test s’avère positif, l’état d‘ébriété du salarié est confirmé. Il convient donc de le retirer de toute situation de travail potentiellement dangereuse pour lui et des tiers, notamment la conduite d’un véhicule si cela fait partie de ses missions. En effet, la responsabilité de l’employeur peut être engagée en cas d’accident. L’article L.4121-1 du Code du travail, sur ce point, dispose « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. […] ». Si l’état du salarié est préoccupant, il convient d’avertir les services de secours.
Un test positif peut servir de fondement à des sanctions : avertissement, mise à pied disciplinaire, voire en fonction des circonstances et du poste, licenciement pour faute.
L’employeur qui envisage de licencier son salarié en état d’ébriété doit, toutefois, pouvoir justifier qu’il a, au préalable, tout mis en œuvre pour prévenir le risque de l’alcool dans son entreprise. Il doit, également, avant d’entamer cette démarche, veiller à se constituer un ensemble d’éléments probants (antécédents disciplinaires, ce que le salarié a bu, quantité, date et heure, témoins, victimes, fréquences, démarche titubante du salarié, conséquences sur son travail…).
À noter
Si le salarié a déjà commis de tels faits par le passé, le caractère récidiviste de son comportement peut justifier son licenciement. Le fait que le licenciement repose bien sur une faute grave fait l’objet d’une appréciation au cas par cas par les juges.
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