Notion de perte de la moitié du capital
Pour rappel, la consultation des associés ou actionnaires est obligatoire si, du fait des pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres d’une société deviennent inférieurs à la moitié du capital social.
Cette notion est importante puisqu’elle traduit la situation financière réelle de la société ainsi que sa capacité théorique à faire face à ses engagements.
À noter : ne sont pas concernées par cette procédure, les SCI, les SNC, les sociétés en procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ou qui bénéficient d’un plan de sauvegarde judiciaire.
Consultation des associés
Le dirigeant est tenu de consulter les associés, dans les 4 mois qui suivent l’approbation des comptes ayant constaté cette perte, pour décider, s’il y a lieu, d’une dissolution anticipée de la société.
Concernant les modalités de la consultation :
- pour une SA, c’est l’assemblée générale extraordinaire qui doit être consultée ;
- pour une SARL, la dissolution ne peut être prononcée qu’à la majorité exigée pour la modification des statuts ;
- pour une SAS, la dissolution ne peut être prononcée que par décision collective des associés dans les conditions prévues par les statuts.
Publicité de la décision des associés
La décision de dissolution ou de maintien de l’activité doit être :
- publiée dans un support d’annonces légales ;
- inscrite au RCS et déposée au greffe du tribunal de commerce du lieu du siège social.
A noter que ces formalités de publicité ne sont pas à réitérer lors de chaque exercice si les capitaux propres demeurent inférieurs à la moitié du capital social.
Les textes ne prévoient aucun délai pour procéder à la publicité. Toutefois, la décision des associés devra être publiée rapidement car elle permet de protéger les intérêts des créanciers sociaux. Cette publicité reste obligatoire si la régularisation est intervenue avant cette formalité.
Régularisation de la situation
Lorsque la dissolution de la société n’est pas retenue, la société dispose d’un délai expirant à la clôture du 2e exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes intervenue, pour régulariser la situation :
- soit en reconstituant les capitaux propres à hauteur d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social ;
- soit en diminuant son capital d’un montant au moins égal à celui des pertes qui n’ont pu être imputées sur les réserves.
Le délai de régularisation de la situation doit être calculé à partir de l’approbation des comptes de l’exercice ayant fait apparaitre la perte et non pas à partir de la date de clôture de cet exercice.
Lorsque la société a régularisé sa situation, elle doit demander que la mention « perte de la moitié du capital » soit supprimée du RCS.
Le défaut de régularisation n’entraine pas la dissolution de la société mais ouvre la possibilité à un tiers de la solliciter (cf b) infra), ce qui est très théorique.
Sanctions du défaut de régularisation
a. Injonction sous astreinte
Dans un premier temps, le juge commis à la surveillance du RCS peut enjoindre, sous astreinte, une société à procéder aux formalités de publicité au RCS lorsqu’elle ne remplit pas son obligation de régularisation.
b. Dissolution de la société
À défaut de reconstitution des capitaux propres de la société dans le délai imparti de deux ans, tout intéressé peut demander au tribunal de commerce de prononcer la dissolution de la société. Toutefois, le tribunal peut accorder à la société un délai maximal de six mois pour régulariser sa situation.
c. Mise en cause de la responsabilité civile des dirigeants
Indépendamment de la sanction précédente, la responsabilité civile des dirigeants sociaux peut être mise en cause si leur inaction cause un préjudice à la société. Cette inaction peut être retenue comme une faute de gestion justifiant une condamnation à combler le passif social si la société fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire.
d. Sanction pénale
La non-reconstitution des capitaux propres dans le délai de deux ans n’entraine pas de sanction pénale pour le dirigeant.
Toutefois, la non-information des associés, comme le prévoit la procédure, est punie d’un emprisonnement de six mois et de 4 500 € d’amende et autorise les associés à demander la dissolution de la société.
Ludovic Tornier
Avocat
l.tornier@oratio-avocats.com
Justine Bompois
Clerc d’avocat
justine.bompois@oratio-avocats.com